- « Je n’ai jamais eu de style,
- je n’ai jamais fait de formes,
- j’ai fait des constructions. »
Considérant qu’il n’y a pas de différence entre la construction d’un meuble et d’une maison, Jean Prouvé développe une « pensée constructive » basée sur une logique de fabrication et de fonctionnalité qui génère une esthétique épurée de tout artifice.
En premier lieu, il faut poser la structure, le squelette métallique de l’abri. Viennent ensuite s’y encastrer les panneaux. Certains ont des fenêtres, d’autres des portes, les autres sont complets. Ne reste plus qu’à poser les tôles qui viennent épouser la structure. Les panneaux des maisons de Jean Prouvé font un mètre et permettent à ces maisons de varier de format (en mètres : 8 x 8, 8 x 12, 24 x 8, 23 x 8, 10 x 12, 8 x 12, 8 x 8…) mais aussi de fonction (maison, bureau d’étude, pavillon, école…). Il en va de même pour l’empagement d’une page. Si nous partons du format standard A4, que nous lui apposons des marges de 7,5mm (marges déterminées par la prise en compte des variations de paramètres d’impression des diverses imprimantes), cela nous permet d’avoir une surface utile de 195 x 282 mm. Cette surface une fois établie peut-être rationnellement divisée par 3 mm. Ce qui permet de dessiner une grille des possibles en 2, 3, 6 ou 11 colonnes et toujours sur une dénomination proportionnelle à la surface. Ces paramètres une fois établis offrent aux architectes/designers diverses possibilités de protocoles variables et modulables pour accueillir du texte, de l’image, des portes, des fenêtres.
C’est à partir de ces observations que j’envisage l’étude du fond d’archive Jean Prouvé comme une porte d’entrée pour établir une recherche sur les corrélations que peuvent entretenir la typographie et l’architecture dans les étapes préliminaires de conception. Il s’agit d’aborder ce travail par ce qui est de l’ordre de l’invisible, à savoir la structure, la grille, la trame, la charpente et de s’épauler sur ces notions afin de construire, dessiner et d’aborder la sphère de la typographie au travers de l’œil et de la main d’un constructeur. Cette démarche posera les fondations d’une recherche et d’une réflexion articulé en trois chapitres : les ressources, l’étude et la production. Divers chantiers seront déployés pour créer un environnement de travail où conception et fabrication font partie du même processus, que ce soit dans l’espace tridimensionnel, que celui du livre.
- La philosophie de Jean Prouvé
- Épisode 4 : L’architecte
- galerie Patrick Seguin
Boxer_2.5D_1996 est la dénomination donnée à cette étape de travail.
- modèle : Peugeot Boxer
- motorisation : 2.5 d
- surface utile : 2 x 2 x 4 m
- charge utile : 710 kg
Dans le cadre du projet de recherche « Entre typographie & architecture », initié à l’Atelier national de recherche typographique, je souhaiterais entamer ce programme par un travail spécifique qui explicite une démarche transversale que je mène au travers des métiers du bois et du design graphique depuis plusieurs années. Ce projet est une étape clef du programme en ce sens qu’il me permet d’introduire une manière d’appréhender la construction de façon didactique, tant dans l’espace tangible — d’un véhicule utilitaire — que dans l’espace du livre. L’enjeu est de se servir de ce projet d’aménagement pour illustrer les corrélations qui existe entre typographie et architecture dans la pratique.
La finalité plastique porte sur la ré-appropriation des principes du canon de proportions harmonieuses, des règles de composition dans l’espace de la page, appliquée à une unité d’habitation. Il interroge par la pratique l’histoire transversale des deux disciplines et l’application de ces notions en regard du contexte actuel.
La finalité pédagogique passe par la documentation exhaustive des étapes et réflexions du projet. Elles seront en libre accès sur le site « la-recherche.alexandre-liziard.be ». Ces étapes de travail seront mise en relation avec diverses références historiques, bibliographiques et iconographiques, puisées tant dans le design graphique que dans l’architecture.
Au delà de l’aspect plastique et pédagogique de ce travail, il s’agit d’inclure les enjeux politiques liés aux problématiques sociales, environnementales et les enjeux de durabilités et d’éco-citoyenneté dans les démarches de conception d’un designer.
La finalité pratique de ce projet est de dessiner, fabriquer et vivre un espace de vie. Il fait partie intégrante du programme de recherche « Entre typographie et architecture ».
Étape 1 — Faites entrer la lumière.
- 2 baie coulissante Farnier avec cadre noir en aluminium 400x400 mm
- 1 sur le flanc gauche
- 1 sur le flanc droit
- 1 lanterneau Fiama vent crystal 420x 420 mm
- 1 sur le toit
- 1 baie coulissante Farnier avec cadre noir en aluminium 600x400 mm
- Porte arrière gauche
Le positionnement de ces ouvertures s’inspire du canon du chevalier Villard de Honnecourt, architecte français du XIIIe siècle. Ce canon de division harmonieuse est habituellement employée en typographie. Il a été remis au goût du jour par Jan Tschichold en 1928 dans son livre La Nouvelle typographie.
En considérant chaque façade de la caisse comme une double page symétrique, la diagonale et les points d’intersection du tracé seront des clefs pour apposer la structure qui accueillera les ouvertures. La zone du rectangle d’or déterminera la hauteur de l’ouverture et son emplacement. Il est cependant évident que les constructions et les données théoriques ne constituent que des éléments de base, susceptibles d’être aménagés, adaptés en fonction de situation particulière. Ici, il me faut prendre en compte les longerons verticaux qui permettent la solidité de la structure de la caisse.
Étape 2 — Carré noir, Kasimir Malévitch (1915)
Afin d’entamer le travail de composition dans ce volume utile, il me faut monter le châssis de la toile et faire les encadrements du Carré noir. Une fois le vide d’air, les voliges, l’isolant et les panneaux posés et enduits, il s’agit de considérer chaque face de cette caisse comme une page blanche pour dessiner les structures nécessaires à la composition par le volume des éléments d’habitation. Je considère ces trois surfaces principales (celles dénuées de portes) comme un triptyque dont les dimensions sont les suivantes : 4x2, 2x2 et 4x2.
Étapes 3 — Charpente, La géométrie secrète des peintres, Charles Bouleau, 1963
L’enjeu de cette étape est de considérer ce qui est de l’ordre de l’invisible, à savoir, les procédés préliminaires à l’empagement d’un livre, au volume d’une œuvre architecturale, au dessin de mobilier, à la composition d’une peinture, d’un plan de film, etc… J’envisage dans cette étape de mener un travail de recherche, inspiré de l’étude de Charles Bouleau sur la structure des peintures de l’antiquité à la peinture moderne. Il va puiser et confondre quelques paradigmes liés à la typographie et à l’architecture. Joseph Muller Brockman et son ouvrage Grid System pour ce qui est de la typographie et Le Modulor du Corbusier pour l’architecture seront les principales sources d’inspirations.
Étape 4 — La fabrication
Étape 5 — Je dors / Je travail
Le projet n’en étant qu’à ses prémices, il est entendu que nombre de variations peuvent avenir dans ce déroulé. L’ensemble de ces étapes de travail seront menés « Entre l’atelier de recherche typographique et l’atelier bois et métal » au sein de l’école.